L’intégration de handicapés en séjour de vacances

Durant les vacances de février ( séjour de ski ) , nous avons décidé d’emmener avec nous, un enfant de 12 ans, handicapé mental ( monozomie 18 + troubles autistiques ). Ce jeune est accueilli durant l’année dans un I.M.E.
L’équipe a été longuement préparé avant le départ, car le jeune Elie , élève du cours de judo du vendredi est un enfant qui peut être turbulent, imprévisible et seule Valérie le connaissait.
Simplement, hors contexte du cours nous nous interrogions sur la manière dont nous allions pouvoir gérer au quotidien, ce petit bonhomme bien différent des autres enfants accueillis habituellement. Au sein des cours de judo il est plus compliqué de gérer son côté caractériel que son côté handicapé.
Bien sûr avant, il avait fallu rassurer les parents avant le départ, leur promettre d’être vigilants et d’avoir « l’œil » constamment sur leur enfant. C’est aussi ce qui nous avait motivé en emmenant Elie: de pouvoir permettre aux parents de « souffler » quelques jours car pour avoir gérée Elie, je peux parler du côté épuisant de la chose, même si ce petit garçon est adorable, il faut déployer pour s’en occupant une énergie hors du commun.

elie_sejour_sportif

Valérie s’attendait à un séjour épuisant, elle s’était mise en condition et était très motivée. La présidente, directrice adjointe et infirmière la suivait dans cette motivation et c’est avec une grande énergie que jours et nuits, elles prévoyaient 7 jours bien mouvementés.
Le voyage en train s’est déroulé correctement ,comme il peut être correct avec un enfant qui crie, parle à tout le monde, va aux toilettes sans cesse, ne tient pas en place…
Les animateurs étaient à ce moment-là encore dans un rôle d’observateurs, Valérie le prenant en charge seconde par seconde.
C’est avant le trajet en car qu’ils sont venus annoncer à la directrice que la gestion de ce petit garçon n’allait pas être supportable pour elle et qu’ils souhaitaient dés ce moment s’en occuper eux aussi. Valérie très attachée à ce jeune ( « remplaçant la maman » durant le séjour a eu quelques instants d’hésitation avant de faire confiance …) a redonné les consignes de surveillance, d’attitude à adopter avec Elie …

Et ce fut un séjour MERVEILLEUX pour tous !

La première journée épuisante pour tous : Elie était énervé, il a fallu dés l’arrivée le changer et le doucher car il avait fait « caca » dans son pantalon, il criait, les petits avaient peur de lui car il les provoquait, il se roulait par terre …Bref, avec les trente deux autres enfants à gérer, ce ne fût pas simple.
Valérie avait pris la décision de parler en toute franchise à tous les enfants pour expliquer le handicap de notre nouveau « colon », de les encourager à aller vers lui tout en respectant que s’ils n’en avaient pas l’envie, ils en avaient entièrement le droit.
Lors de la première réunion d’équipe, il a été décidé qu’il serait impossible pour Elie de participer aux cours de ski collectifs et c’est avec plaisir que chacun a proposé de le prendre en charge deux heures chaque après-midi pour le faire progresser.
Et puis, Elie a commencé à ne plus hurler et crier, ne plus se rouler par terre…
Nous avons décidé après une première nuit chaotique avec les autres enfants, que Valérie et Catherine le garderaient dans leur chambre pour dormir. Plus prudent, plus gérable, plus facile, plus rassurant pour tous . Bref, impossible de faire autrement car il ne fallait pas oublier non plus les autres enfants venus pour passer un bon séjour et à qui l’on ne pouvait pas non plus imposer la présence d’Elie la nuit.
La journée, les enfants se rapprochaient de plus en plus de notre petit protégé, ils commençaient spontanément à l’installer à table avec eux pour les repas, l’aider dans des gestes de vie quotidienne, lui parler, chanter avec lui.
Et là, miracle notre Elie a commencé à se transformer, à s’intégrer complètement au groupe. Chaque jour qui passait les enfants nous le faisaient remarquer, les animateurs le constataient également.
Nous avons donc décidé en accord avec le directeur de l’école de ski français de lui offrir des cours particuliers. Et ça a fonctionné ! Il s’est calmé au fur et à mesure des séances, qui duraient de plus en plus longtemps. Le moniteur s’est attaché à notre jeune Skieur et prenait un grand plaisir à lui enseigner ce sport. Il a même pris le « tire-fesses »! Nous étions fiers de lui et le félicitions constamment.
S ‘occuper de lui devenait un plaisir, sa joie et sa bonne humeur nous séduisaient. Même son petit visage si particulier changeait; se détendait, plus de grimaces renfrognés, un bien être s’y lisait.
Bref, nous le sentions HEUREUX parmi nous tous. Bien sûr, la surveillance restait constante et la fermeté obligatoire. Il faut quand même savoir qu’il faut un adulte 100% du temps jour et nuit pour s’occuper de cet enfant handicapé.
Nous avions engagé au sein de notre équipe une personne supplémentaire spécialement pour lui. Le caractère si particulier de cet enfant nous donnait tous envie de passer du temps avec lui, si bien qu’il n’avait pas d’animateur référent ( ce devait être moi au départ car je pensais avoir du mal à déléguer )car tous manifestaient le désir d’être à ses côtés.
Le séjour s’est poursuivi avec délice, Élie à nos côtés. Il a terminé le séjour en prenant ses repas avec ses copains, serviette autour du cou, en autonomie totale, se servant comme ses camarades au buffet, respectant les règles de propreté et de discipline.
Durant les instants de vie quotidienne, plus aucun soucis non plus. Élie a participé à toutes les activités, nous ne le reconnaissions plus.
Lorsqu’il a fallu retourner à Paris, quelle tristesse pour nous tous de se séparer de lui !!! Sa transformation était telle que même les plus petits nous en parlaient .
Petite anecdote : Une petite fille pleurait le premier jour car elle avait peur de devoir danser avec lui à la boum et …le jour de la boum, c’est elle qui est allée l’inviter pour danser un slow !!!
Cette expérience nouvelle pour nous a été totalement concluante.
Depuis, Élie a « grandi » dans sa vie quotidienne, il a gardé ce changement positif au sein des cours de judo. Ses parents ont constaté un réel changement également.
Beaucoup de parents m’ont contacté pour me dire à quel point le contact de cet enfant handicapé a apporté à leurs enfants.
Alors pourquoi ne pas renouveler cette expérience magique pour tous ?
C’est ce que nous avons fait cet été , en accord avec tous ( équipe d’animation et enfants )
il est venu participer à notre séjour d’été une semaine ( la deuxième) . Il a été accueilli comme un roi à son arrivée : tous le réclamaient et l’attendaient !
Et ce qui a été le plus positif pour nous, c’est qu’il est arrivé avec le même comportement que celui qu’il avait en nous quittant en février : Un grand garçon posé, calme et heureux !!! Aucune régression n’a été constaté.
Il a repris un rythme tranquille, acceptant les consignes comme les autres. Il s’inscrivait à toutes les activités , il est allée à la piscine, à la patinoire, à fait de la spéléologie, a participé à toutes les journées à thèmes, dansé …
Comme tout se passent plus facilement dans l’organisation du quotidien, on a pu décider d’un objectif pédagogique adapté à Elie: lui apprendre à apprivoiser sa peur ( toboggan à la piscine, spéléologie… )
Ce fût un séjour d’une richesse incroyable pour lui ( pour nous tous aussi ) Il croquait la vie, était détendu, joyeux. Je pense aussi que mon équipe d’animation et les enfants ont un grand respect pour lui, il se sent vraiment « comme tout le monde » avec nous. Personne ne se moque de lui, mais nous rions beaucoup tout de même en sa présence car Elie aime faire le clown et nous amuser. Il est entouré de bienveillance, nous sommes fermes avec lui (il en a besoin ), mais nous restons naturels et l’acceptation de ce petit bonhomme en colonie de vacances est un choix pour nous, donc, nous trouvons un réel plaisir à le faire progresser.
Judo Club Baudricourt est ravi d’intégrer des enfants handicapés. Le seul soucis rencontré est le financement des séjours . En effet, comme mentionné plus haut les bienfaits d’un tel séjour pour un enfant différent sont énormes, reste le problème du coût d’un tel séjour. D’une part les parents participent financièrement exactement comme les enfants valides (et l’association tient à ce que ce tarif ne soit pas plus élevé) , mais de deux le séjour coute en plus à l’association une somme d’environ 1500€ pour deux semaines, c’est le coût d’un animateur supplémentaire embauché à cette fin ( entre le prix de l’hébergement, le voyage, le salaire + les charges, les activités …).

L’association pourra renouveler cette expérience extraordinaire l’an prochain si des subventions lui sont accordées.